Organiser, désorganiser, réorganiser le travail (JIST, 1-3 juillet 2024)
L’APSE était invitée à la 18ème édition des Journées Internationales de Sociologie du Travail (JIST) qui se sont tenues à Evry du 1er au 3 juillet 2024.
Le thème général de ces journées d’études – organisées par deux laboratoires de recherche, le Centre Pierre Naville et le Printemps – s’est décliné en cinq axes qui ont donné lieu à des sessions avec communications et discussions, parallèlement aux séances plénières et aux tables rondes :
Axe 1 – Permanence et reconfiguration des rapports sociaux dans l’organisation, la désorganisation et la réorganisation du travail,
Axe 2 – Ce que le numérique et la digitalisation font à l’organisation, la désorganisation et la réorganisation du travail,
Axe 3 – Ce que les mobilisations collectives et individuelles font à l’organisation, la désorganisation et la réorganisation du travail dans le contexte de mutation du travail et de l’emploi,
Axe 4 – Ce que les politiques publiques font à l’organisation, la désorganisation et la réorganisation du travail,
Axe 5 – Ce que les « crises » font à l’organisation, la désorganisation et la réorganisation du travail.
Autant de sujets en lien avec les ateliers, thématiques et activités de l’APSE !
S’il est impossible de rendre compte intégralement de ces trois journées d’échanges qui ont été riches (le programme était dense : https://jist2024.sciencesconf.org/) et qu’il a fallu faire des choix drastiques, vous trouverez ci-dessous un aperçu de quelques ateliers auxquels nous avons pu participer.
Un grand merci au comité d’organisation, notamment Lena Werno, qui vient de rejoindre le Conseil d’Administration de l’APSE, et une mention spéciale pour Guillaume Tiffon, directeur du Centre Pierre Naville.
➡ Atelier « Sens au travail et environnements de travail«
Des membres de l’APSE étaient en force dans cet atelier animé par François Sarfati et Rémi Ribierre.
Adam Piotrowski, ingénieur de recherche chez EDF en CIFRE et doctorant en sociologie du travail au sein du LATTS (CNRS – Université Gustave Eiffel – Ecole des Ponts ParisTech) a présenté ses travaux sur la régulation managériale en télétravail et ses difficultés, entre communication formelle et informelle.
Avec Mathieu Lefranc, architecte programmiste chez Génie des Lieux et doctorant en sociologie (Univ. Paris 1, Laboratoire CETCOPRA), il a été question de la participation des salariés à la conception des bureaux pour développer une culture de la mobilité qui contribue aussi à déraciner le travail.
Anca Boboc, chercheuse senior chez Orange Labs et docteure en sociologie au LATTS (ENPC) et Julia Val Le Goll, doctorante au sein du LESC (Université Clermont Auvergne), ont analysé la crise de sens au travail consécutive au flex office dans un contexte de changements fréquents.
➡ Atelier « Mobilisations managériales«
Cet atelier était animé par Léa Lima et Alexis Louvion.
Edouard Chamblay, doctorant en sociologie au CNAM, a présenté sa recherche au sein d’une grande banque sur le développement de formations à la créativité comme compétence révélatrice d’une nouvelle forme de l’esprit du capitalisme.
Avec Mathieu Uhel, maître de conférences à l’Université de Caen Normandie, il a été question de l’enrôlement en équipes autonomes des aides à domicile dans une association en crise.
➡ Atelier « Mobiliser autour de l’organisation du travail«
Cet atelier était animé par André Moulin.
Cédric Lomba, chercheur au CRESPPA et co-président de l’Association Française de Sociologie et Maira Abreu, docteure en sciences sociales, ont montré les effets mobilisateurs de la lutte contre la précarité dans l’enseignement supérieur et la recherche.
Avec Pauline Grimaud, post-doctorante au CEET, il a été question de la semaine de 4 jours et de ses effets potentiels sur la mobilisation des salariés comme sur l’intensification du travail et les contraintes horaires élevées.
Clémentine Colmont, doctorante en sciences de gestion au LENTIC (UC Louvain et HEC Liège), a analysé le dialogue social dans le secteur du commerce alimentaire en Belgique, en particulier sur le sujet des commissions paritaires.
Yahiaoui Fouad, de l’Université Abderrahmane Mira de Béjaïa, a évoqué les enjeux de la mobilisation syndicale face aux mutations du travail des manutentionnaires du port de Béjaïa en Algérie.
➡ Atelier « Organisations / réorganisations productives«
Cet atelier était animé par Olivier Guillaume et Manon Plégat.
Sébastien Petit, maître de conférences en sociologie à l’Université d’Evry (Centre Pierre Naville), a analysé le rôle des cadres dans les réorganisations du secteur aéronautique, entre tension et régulation.
Avec Marine Ledroit, doctorante en sociologie à l’EHESS, nous sommes partis en Turquie pour rencontrer les ingénieurs agricoles qui encadrent les saisonnières, et qui recomposent l’organisation genrée du travail.
Alexandre Butin, membre du CA de l’APSE, et Jeanne Fillonneau, doctorante en sociologie à l’Université Gustave Eiffel et au LATTS, ont analysé les effets d’un réaménagement en flex office en termes de stratégie immobilière, de rationalisation des surfaces, d’enrôlement participatif, d’évolution des usages, et finalement de mise en scène pour acheter la paix sociale.
Conclusion de notre participation
En guise de synthèse forcément subjective, quelques points saillants qui ont pu émerger au fil des différentes communications que nous avons pu écouter, et qui résonnent selon nous avec des débats de l’APSE :
Risques :
- La fragmentation des collectifs et l’importance de l’informel dans le travail,
- La sur-adaptation aux exigences de performance,
- La diminution des droits réels des travailleurs,
- L’augmentation de la rationalisation de la gestion du travail.
Normes :
- La progression des règles personnalisées dans le travail,
- Le développement des « soft skills » (créativité, agilité),
- La moindre importance de grands principes abstraits dans le travail,
- La déstabilisation et les reconfigurations provoquées par de nouveaux enjeux (politiques, environnementaux, logistiques).
Relations professionnelles :
- Une progression du dialogue professionnel,
- Des tendances différentes selon les classes sociales, âges et lieux de travail,
- Les écarts entre discours et pratiques,
- Le poids de la rhétorique managériale (modernité, flexibilité).
Enfin, une mention spéciale pour la partie conviviale de cette édition, entre films, BD, librairie, soirée et ambiance très sympathique !
A signaler aussi les contacts fructueux de l’APSE avec les laboratoires invitants qui augurent des relations renforcées.
Blaise Barbance, vice-président de l’APSE